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Infra-rose a un mot de passe que tu connaitras pas
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Infra-rose elle connait toute ta vie et celle de ta mère
The Sound of Music




      C'était une belle journée pour partir.

      A l'horizon la neige des montagnes nous éblouissait, je crois que je n'avais jamais vraiment fait attention au blanc lumineux qui embrasse la ville jusqu'à hier midi.
Je ne me souvenais pas avoir déjà eu cette impression, l'impression de vivre au plus bel endroit du monde, encore plus beau que la nouvelle Zélande, encore plus beau que la Turquie, encore plus beau que la Terre de Feu quand le continent se fond dans la mer à l'heure où les hommes s'endorment.


La dernier soir a ressemblé au tout premier.

      Sans artifice, sans drame.
On avait tous les deux les cheveux sales et des cernes sous les yeux, il avait fait un tas de ses bagages dans un coin, quelques livres, des habits, notre couverture bleue en polaire soigneusement pliée, son vélo sur le balcon.

On a regardé un film qui faisait peur et je serrai son bras trop fort.

"Les gens disent souvent qu'ils n'ont plus peur du noir, je ne les comprends pas. Moi le noir j'en ai encore peur".



       On a parlé très longtemps, mais c'était tout simple.
On a dormi ensemble au sens innocent du verbe et j'écoutais son souffle régulier en regardant le ciel voilé, parce qu'on dort toujours les volets ouverts, comme ça il ne fait jamais noir et il n'y a rien qui peut se tapir dans les coins de la pièce.

      J'ai eu très mal au ventre dans la nuit, j'ai eu envie de foutre mes principes à la poubelle et de me bourrer de médicaments pour ne plus sentir la douleur, pour ne pas gâcher ces dernières heures.
Je ne l'ai pas fait.
ça aurait été si simple pourtant.
Il a des tiroirs entiers de médicaments, des pilules de toutes les formes et de toutes les couleurs, en veux-tu en voilà. Il y a longtemps qu'elles sont là, il n'y touche jamais, mais à chaque fois que je pose les yeux dessus dans sa salle de bain je repense à ce trou noir. 



Vous croisez dans le village ensoleillé était le meilleur hasard qu'il pouvait m'arriver.


       On vous a attendu dans sa voiture en écoutant du Chopin. C'est peut être à cause de Chopin que j'ai pleuré. A peine, deux larmes et déjà il me grondait, et j'acquiesceais en souriant et en tapotant mes yeux avec un mouchoir en papier. Il déversait un flot de paroles que je n'écoutais pas vraiment, c'est toujours comme ça quand quelqu'un pleure, on se sent obligé de lui raconter plein de choses, de l'inonder de promesses pour qu'il ne se noie pas dans ses larmes.

Dans le parc j'étais heureuse d'être avec vous et avec lui, on a dit plein de bêtises stupides qui me faisait rire.




Et puis pour la dernière fois il m'a embrassée, là debouts dans la neige.
Et après c'était fini, on est sortis du parc, et il est parti.

Il a klaxonné en passant et il a fait exactement ce que je lui avais demandé, partir le plus vite possible, écraser l'accélérateur.

Partir sans se retourner.



        J'ai même pas pleurer, on est remontés en discutant, ça faisait du bien de marcher dans le froid et le soleil, on a chanté nos chansons et à nouveau c'était fini.

A la maison c'était exactement comme je l'avais imaginé, j'ai posé mon sac vert sur le lino clair de ma chambre.
Sauf que je n'ai pas pleuré.

J'ai analysé la scène des Mains Sales, j'ai commencé à lire mon cours de philo, je me sentais bien.

Ma sœur était rentrée, ça faisait longtemps, longtemps qu'on n'avait pas été tous les cinq, et qu'on avait pas fait des crêpes, longtemps que je n'avais pas mangé avec eux le samedi soir.

         On a regardé la Mélodie du Bonheur, j'aimais beaucoup quand j'étais petite.
A présent je ne vois plus que les rouages d'une vieille comédie musicale kitsch, avec Julie Andrews et son sourire démesuré qui s'égosille et joue à Heidi dans les montagnes verdoyantes de l'Autriche des années 30.
Mais ce n'était pas grave, on a beaucoup ri avec mon père et ma sœur en refaisant les dialogues.

Et puis, malgré les années, j'ai toujours le cœur qui se serre quand le capitaine commence à chanter "edelweiss".

        Je ne sais pas pourquoi, il y a des choses, comme ça, qui restent. Et des années après c'est toujours la même émotion qui nous submerge, alors même qu'on ne l'avait pas comprise la première fois.







Ce matin il m'a appelée quelques minutes à la frontière. 

Aujourd'hui encore il fait beau.


Aujourd'hui encore c'est une belle journée pour partir. 




Ma route à moi est sans asphalte, sans pavés, sans graviers.

Mais l'arrivée est la même.










 







 

J'ai le coeur qui bat à 76 pulsations par minute et je m'appelle Infra-rose, à 16:21 parce qu"j'ai aussi des rubriques sans nom bizarre, la preuve".

Déclarations d'amour des poules sur un mur qui picotent du pain dur

  penseeenvrac
penseeenvrac
02-02-10
à 22:28

c'est beau. la musique est magnifique. elle m'a remplis de mille frisson et m'en a donné les larmes aux yeux (même si ce soir ce n'est pas dur). c'est triste un dernier soir. mais ca veut dire qu'il y en a eu un premier. un beau. je t'imagine dans un petit appartement sous les toits, blotti contre lui, à fixer ce ciel étoilé, et à a penser sans doute que tu voudrais que le temps s'arrête. enfin je ne sais pas. je ne te connais pas au fond. mais ton texte m'a émue alors je suis venue mettre un petit peu de mes mots ici..

  Infra-rose
Infra-rose
04-02-10
à 23:25

Re:

Merci, moi aussi j'ai été émue par ce que tu m'as écrit parce que c'était exactement ça.
Et pour la musique je comprends vraiment.

Bonne continuation, même si, moi non plus je ne te connais pas au fond.


  lili
05-02-10
à 20:02

Je n'avais plus l'adresse de ton blog. J'aime toujours lire tes mots qui ont ce parfum particulier, je sais pas où tu l'as trouvé, cette odeur particulière qui te caractérise, et les couleurs qui transparaissent.. un petit départ tout simple.. jsuis un peu déçue de pas avoir pu vraiment le voir et vraiment lui parler, je veux dire assez pour le connaitre, avant qu'il ne parte, mais c'est pas pour toujours, il reviendra, et quand tu auras pu ressentir assez son odeur pour t'en ennivrer, alors je t'en conjure, organise une ptite soirée tranquilou avec moi, les filles et luiiii, qu'on puisse papoter en toute tranquilité!lool.

C'est beau du soleil, de la neige, une musique de chopin, et un parc, comme dernière image.. et puis ya encore internet, comme tu dis. (là on peut dire vive la modernité : skype et tout le bazar sont bien utiles pour rester proches!!). j'admire, je crois, ta simplicité, votre simplicité. Je veux la même si je recommence, un jour, une histoire avec quelqu'un..  Courage pour les jours sans soleil et sans musique.

Je te fais de gros bisous ma choupii que j'aime tant.


  Infra-rose
Infra-rose
06-02-10
à 14:57

Re:

A son retour c'est promis.

Merci d'être passée, t'as un bisou sans soleil et sans musique, mais un bisou quand même, de Infra-rose qui picole trop de grenadine à ses heures perdues.
(Ah c'est beau la jeunesse.)




  LiliLou
LiliLou
07-02-10
à 00:21

Moi RAF, j'aime pas les départs et rien n'y fera, même tes jolis mots.
Mais quand même. =)



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